Dans l’atelier de Barbara Lormelle
Embellir votre quotidien
IMAGES: JEAN-PIERRE VAILLANCOURT
Bonjour Barbara, peux tu nous raconter ton histoire avec la céramique ?
Au tout départ, j’étais amatrice de céramiques, mais plutôt industrielles. Je collectionnais de vieux bols en faïence ébréchés, j’aimais l’idée qu’ils aient traversé les années, qu’ils aient une histoire. Mon grand-père a travaillé tout jeune dans les faïenceries de Digoin-Sarreguemines, il nous parlait biscuit, c’était passionnant. A l’époque j’étais à mille lieux d’imaginer que j’en fabriquerai un jour.
Pourtant j’ai grandi à proximité d’un atelier, mon père était designer. Je le voyais dessiner et réaliser une multitude d’objets plus ou moins sophistiqués, avec toutes sortes d’outils et matériaux. Il m’a transmis une sensibilité à l’esthétique de l’objet, à la beauté des objets utiles jusque dans les détails. Il était très habile (c’est peu dire) et il m’a laissée apercevoir tout ce qu’on pouvait réaliser avec ses mains.
Curieusement la céramique s’est invitée dans ma vie bien plus tard, après avoir découvert un joli portrait documentaire sur Simone Perrotte. J’étais complètement séduite par le rapport à la matière et la démarche laissant place à l’imprévu. A cette époque j’étais concepteur-réalisateur multimédia depuis ma sortie des Gobelins quinze ans auparavant. Au fil des années la technique prenant le pas sur la création j’ai senti qu’il manquait une dimension à tout ce que je faisais. Je recherchais un retour à des choses plus simples, plus authentiques, il fallait que je tourne une page. Je me suis formée aux Ateliers Chemins de Terre et j’ai passé mon CAP tourneur. Parallèlement j’ai eu la chance incroyable de trouver un atelier à Paris, grâce à une amie et une annonce sur le bon coin, et j’y suis installée depuis.
Qu’est ce qui te procure le plus de plaisir dans ton métier ? Qu’est ce qui te semble le plus difficile ?
Travailler de ses mains et voir apparaître un objet aux bouts des ses doigts procure une satisfaction incomparable.
C’est un métier où l’on travaille beaucoup avec l’imprévu, il est omniprésent. J’ai beau vouloir maîtriser chaque étape, j’ai toujours le sentiment qu’il y a une part de la création qui nous échappe. L’ouverture d’un four est pleine de surprises, parfois au dessus des espérances, parfois décevantes et frustrantes. Il faut simplement accepter que ce qui peut être considéré comme un défaut par rapport à l’idée d’origine rend finalement la pièce vraiment unique, belle et intéressante.
Ce qui est le plus difficile pour moi c’est justement de sortir de l’atelier pour présenter mon travail, le faire connaître. J’y vais à petits pas.
Qu’est ce qui t’inspire ? Comment définirais-tu l’esthétique de ton travail ?
La terre elle même est la première source d’inspiration. J’ai beaucoup travaillé la porcelaine parce que j’étais attirée par sa blancheur, sa finesse et sa translucidité. On peut façonner la lumière, et jouer avec les contrastes au toucher. C’est le blanc et la translucidité qui m’ont inspiré le dessin des nuages.
Aujourd’hui j’essaie de travailler une terre diamétralement opposée : une faïence noire chamottée. Elle m’emmène vers d’autres dimensions, des pièces plus grandes que je construis aux colombins. Du coup je sors un peu du tour et des formes circulaires, sans savoir encore où ça mènera.
Je cherche surtout à créer des objets utiles, aux formes simples, auxquels j’essaie d’insuffler un peu de poésie. J’espère qu’ils serviront et enjoliveront le quotidien des gens et que certains traverseront quelques années.